Cancers de l’enfant : Trois patients sur quatre arrivent à des stades très avancés (Dr Bouda)
Le 15 février de chaque année, le monde entier commémore la journée internationale de lutte contre le cancer de l’enfant. Une journée qui permet d’informer, de sensibiliser la communauté et de soutenir les enfants atteints de cancer. A l’occasion de cette journée, Dr Gabrielle Chantal Bouda, médecin oncopédiatre au CHU Yalgado Ouédraogo attire l’attention des populations sur les signes qui peuvent faire penser à un cancer et les chances de survie de l’enfant si le cancer est diagnostiqué précocement.
Quels sont les signes qui doivent alerter ?
La plupart des cancers se manifestent par un gonflement ou tuméfaction sur une partie du corps. :
– Pour les cancers des ganglions et du sang appelés lymphomes, il peut commencer au niveau du visage, surtout les mâchoires et les joues qui augmentent de volume avec des dents qui bougent et qui finissent par tomber. La tuméfaction peut concerner aussi l’œil, la tête et le cou.
La tuméfaction atteint fréquemment aussi le ventre et plus rarement d’autres parties du corps. Ce sont des cancers d’enfant d’âge scolaire et même des adolescents.
– L’augmentation du volume du ventre est aussi un signe de cancer du rein (néphroblastome) , au cours duquel, le malade peut aussi saigner dans les urines.
– Pour le cancer de l’œil qu’on appelle rétinoblastome, le gonflement n’est pas au premier plan. Mais quand il apparait, c’est que c’est déjà à un stade avancé. C’est un cancer du jeune enfant avant 5 ans. Les premiers signes qui doivent alerter sont :
– Une tâche blanche au niveau de l’œil de l’enfant: la nuit, l’œil brille à la lumière, c’est comme l’œil de chat.
Pourtant l’enfant n’a pas mal et il voit bien au début. Mais par la suite, l’enfant peut commencer à ne pas bien voir
Un jeune enfant qui regardait normalement et qui se met à regarder de travers (loucher), cela doit alerter.
– Pour les signes qui font penser à une leucémie (cancer du sang):
– Il y a le saignement : il faut faire attention aux enfants qui saignent beaucoup du nez, de la bouche, ou plus rarement dans les urines et les selles. Cela veut dire qu’il y a peut-être une anomalie au niveau du sang. Cela peut être le signe d’une leucémie.
– Il peut s’agir d’anémie à répétition : ce sont des enfants qui sont transfusés plusieurs fois et pour qui on pense parfois que ce sont des accès de paludisme grave
– Il peut s’agir d’enfants qui ont des infections ou des fièvres avec des hospitalisations répétées.
La leucémie peut aussi se manifester par un gonflement des ganglions du cou, des aisselles ou d’autres parties du corps.
– Certains de ces signes ne sont pas spécifiques du cancer et il y en a d’autres comme la fatigue, le manque d’appétit et l’amaigrissement que l’on peut retrouver dans d’autres maladies. La répétition et/ ou l’association des signes doit faire prendre la décision de consulter.
En effet, les cancers de l’enfant se développent très rapidement. Plus on les voit tôt, meilleur est le pronostic. Dans tous les cas devant tout signe anormal chez un enfant il faut toujours consulter, même si ce n’est pas un cancer.
Quels sont les chances de survie?
Tout dépend du type de cancer, du stade de la maladie et des possibilités de traitement. Trois patients sur quatre arrivent à des stades très avancés chez nous. Pour prendre l’exemple du cancer du ganglion appelé lymphome de Burkitt, nous sommes à un taux de survie de 50 à 60% alors qu’ailleurs, ce sont des patients qui survivent à 90-95%.
Pour le cancer de l’œil, en Europe, ils ont pratiquement une survie à 99%. Cela veut dire qu’ils sont diagnostiqués très précocement et traités. La plupart du temps, les enfants traités conservent leurs yeux et certains voient.
En 2021, nous avons reçu 33 patients souffrant de ce type de cancer. Sur les 33 patients, 22 étaient à un stade dépassant nos possibilités de traitements curatifs. Nous ne pouvions espérer guérir que 11. Parmi lesquels, il y a eu 3 refus de traitement, 6 survivants et 2 décès. Le traitement comporte plusieurs volets dont la chirurgie qui n’est souvent pas acceptée.
Plus le diagnostic est fait tôt plus les chances de guérison sont grandes
Madina Belemviré
Source photos: Service d’oncologie du CHU YO