Contraception en milieu scolaire: Un moyen pour lutter contre les grossesses précoces et les avortements clandestins ?

L’utilisation des méthodes contraceptives en milieu scolaire, un sujet qui suscite des debats. Selon une récente étude, 32% des filles et 42% des garçons élèves ont déclaré avoir eu au moins un rapport sexuel avant respectivement 16 ans et 17 ans. Ces jeunes notamment les filles ont- elles eu recours à des méthodes contraceptives? Pour en savoir davantage sur les résultats de cette étude, les avantages et les inconvénients de l’utilisation des méthodes contraceptives par les élèves, Bulletin santé a échangé avec le Dr Sibraogo Kiemtoré, gynécologue obstétricien au CHU Yalgado Ouédraogo et membre de la Société des gynécologues et obstétriciens du Burkina (SOGOB) qui a mené l’étude.

Bulletin santé (BS): La contraception en milieu scolaire peut-t-elle être un moyen pour lutter contre les grossesses précoces et les avortements clandestins ?

Dr Sibraogo Kiemtoré (Dr SK): Sur le plan médical, où les élèves sont souvent des adolescents (es), ce qui est recommandé c’est l’abstinence sexuelle. Pour cela, il faut que ces élèves aient une bonne éducation qui soit vraiment pertinente et efficace. Cette éducation doit se faire aussi bien dans le milieu familial, que dans les établissements. Il ne faut pas laisser les élèves s’informer uniquement à travers les réseaux sociaux. Mais pour les élèves qui ont des rapports sexuels, il est recommandé d’utiliser des moyens de contraceptions pour éviter les grossesses et les avortements provoqués clandestins avec les conséquences qui peuvent s’en suivre.

BS: La SOGOB a réalisé une étude sur la pratique de la contraception en milieu scolaire du 1er février au 30 avril 2020 dans vingt établissements de la ville de Ouagadougou. Qu’est-ce qui a motivé le choix de cette étude ?

Dr SK: Cette étude fait suite à une précédente étude qui avait montré que 32% des filles et 42% des garçons élèves avaient déclaré avoir déjà eu au moins un rapport sexuel dont l’âge moyen pour les premiers rapports sexuels était de 16 ans pour les filles et 17 ans pour les garçons. En plus de cela, dans les établissements scolaires, d’après les statistiques des directions régionales en charge de l’enseignement secondaire, il existe chaque année, des milliers d’élèves qui tombent enceintes sans le vouloir. Il était logique de s’interroger sur les élèves qui ont des rapports sexuels qui utilisaient des méthodes contraceptives.

BS: Qu’est-ce qu’on peut retenir des résultats de cette étude ?

Dr SK: On peut retenir des résultats de cette étude qui a concerné les élèves dont la tranche d’âge est de 16 et 22 ans, que seulement 67% des élèves ont une connaissance satisfaisante sur la contraception. La contraception d’urgence était très peu connue car 78% des élèves l’ont cité comme méthode de contraception. On retient aussi que 63% des élèves qui ont des rapports sexuels ont déclaré utiliser le préservatif masculin. Par contre, le préservatif féminin n’a jamais été utilisé. De ces résultats on retient donc que ces élèves qui ont des rapports sexuels sont nombreux à ne pas utiliser le préservatif qui protège pourtant contre les infections sexuellement transmissibles (IST). On leur a aussi posé la question de savoir s’ils connaissaient la double protection, c’est-à-dire, l’utilisation d’un préservatif et d’une autre méthode, mais il est ressorti que seulement 8% des élèves la connaisse et l’utilise.

BS: Pourquoi parler de la contraception à ses enfants ?

Dr SK: Parler de la contraception à ses enfants, c’est leur apprendre à se connaître, à connaitre leur anatomie, à savoir comment leurs organes sexuels fonctionnent. Ce n’est pas les encourager à avoir des rapports sexuels comme le pensent certains. Au contraire, cela peut même les amener plus tard à repousser les rapports sexuels. Il est donc nécessaire qu’ils soient informés pour qu’ils sachent au moins qu’il y a des méthodes de contraception qui existent et qui peuvent les aider à prévenir les grossesses et les IST au cas où ils venaient à avoir des rapports sexuels.

BS: Ces méthodes contraceptives sont-t-elles sans conséquences ?

Dr SK: Les différentes méthodes de contraception proposées aux femmes y compris les adolescents (es) ont été scientifiquement évaluées. Mais tout traitement a ses avantages et des inconvénients et la contraception n’échappe pas à cette règle. C’est pour cela qu’avant de prescrire une contraception, il y a un entretien avec la demandeuse, pour discuter des avantages et des inconvénients des différentes méthodes de contraception. Mais globalement, il faut retenir que pour une adolescente qui a des rapports sexuels, les avantages de la contraception sont nettement supérieurs aux inconvénients.

BS: Peuvent-t-elles rendre la femme infertile ?

Dr SK: Les méthodes contraceptives sont des méthodes réversibles, c’est-à-dire que ça ne rend pas stérile. Une fois que la méthode est arrêtée, on retrouve toutes ses capacités d’enfantement. Il n’y a aucun prestataire qui va proposer une méthode contraceptive qui n’est pas réversible à une adolescente, à une élève.

BS: Quels peuvent être les conséquences des rapports sexuels non protégés?

Dr SK: Quand on a des rapports sexuels non protégés, il y a risque de grossesse non désirée. Une grossesse non désirée qui survient, l’adolescente peut pratiquer l’avortement clandestin qui se fait souvent dans de très mauvaises conditions et qui occasionnent des complications. En dehors de ça, il y a des conséquences sociales. Beaucoup d’élèves ont abandonné l’école du fait de la survenue d’une grossesse. Au niveau familial, il y a des familles où cela est sévèrement puni. Des élèves même qui quittent leur milieu familial parce que la grossesse n’est pas du tout admise avant le mariage. Il y a aussi les IST dont on connaît les connaissances néfastes.

BS: Des conseils à l’endroit des parents?

Dr SK: A l’endroit des parents, il ne faut pas hésiter à évoquer la sexualité en famille. Mais il faut savoir aborder le sujet avec tact et ne pas laisser les enfants s’informer auprès de leur camarade. Il faudrait que dans les établissements aussi, on en parle. Que les garçons et les filles apprennent à se connaitre leurs organes sexuels, comment ça fonctionne et quels peuvent être les enjeux des rapports sexuels et des rapports sexuels sans protection.

Madina Belemviré

One thought on “Contraception en milieu scolaire: Un moyen pour lutter contre les grossesses précoces et les avortements clandestins ?

  • 30 septembre 2021 à 18h48
    Permalink

    A quel âge peut-on parlé de la sexualité aux enfants

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

quatorze + dix-huit =